Président de l’Association Marocaine des Études Spatiales et unique Marocain participant à la mission spatiale analogique professionnelle de l’Interplanetary Space Agency en 2024, Ismail El Omari est un jeune architecte gadiri âgé de 32 ans. Il a grandi au quartier Riad Salam et il est lauréat de l’École Nationale d’Architecture de Rabat et de l’Université Mohammed VI Polytechnique de Benguerir où il a obtenu un master nommé « Resilient, Sustainable and Smart Buildings and Cities ».
Nous avons le plaisir de mener avec lui cet entretien inspirant et motivant où il nous entraîne dans un monde où tout est possible. Un moment passionnant, mais aussi un appel et un clin d’oeil aux parents et enfants qui rêvent de changer le monde et de regarder là où l’avenir de l’humanité se projette, à la recherche d’une vie hors du commun de pionniers de l’espace. Dans cet entretien, Ismail El Omari nous démontre que ces perspectives captivantes sont aujourd’hui à la portée des jeunes de notre ville.
De la conception d’habitats sur Terre à ceux de l’espace, en orbite terrestre, sur la Lune ou sur Mars, il n’y a qu’un pas que vous avez franchi. Parlez-nous de votre formation dans les domaines de l’exploration spatiale et de l’architecture spatiale.
« Mon intérêt pour l’astronomie a commencé dès l’enfance, en observant le ciel nocturne et en me questionnant devant la Lune, les étoiles… Cette fascination s’est transformée en une passion qui m’a guidé tout au long de ma formation académique. J’ai d’abord étudié l’architecture à l’École Nationale d’Architecture de Rabat, puis j’ai poursuivi avec un master en « Resilient, Sustainable, and Smart Buildings and Cities » à l’Université Mohammed VI Polytechnique de Benguerir. *
Mes premiers pas de jeune passionné d’astronomie et d’exploration spatiale furent de visionner des dizaines de cours en ligne et de documentaires sur les épopées mythiques des agences spatiales américaines, soviétiques, européennes… jusqu’à l’avènement du programme spatial international Artemis, en 2021, qui aura pour mission d’établir la première base habitée sur la Lune, de manière permanente. Ce fut pour moi une révélation : pouvoir concilier mon métier d’architecte avec ma passion pour l’architecture spatiale. En 2022, j’ai eu l’honneur de représenter le Maroc à la première édition du workshop international dédié à l’architecture spatiale et au design en milieu extra-atmosphérique à l‘International Space University de Strasbourg. Cette expérience m’a ouvert les yeux sur les possibilités infinies de l’exploration spatiale. »
Parlez-nous de l’Association Marocaine des Études Spatiales (A.M.E.S) dont vous êtes le président. D’où est venue l’idée de créer cette association et quelles en sont les actions stratégiques ?
« L’idée de créer l’Association Marocaine des Études Spatiales (A.M.E.S) est née lors de mon workshop à Strasbourg. J’ai remarqué que des participants venaient de pays avec des programmes spatiaux bien établis, comme l’Inde, grâce à une démocratisation de l’accès à l’information et à l’encouragement des initiatives dès le plus jeune âge.
Avec mes co-fondatrices, Mesdames Sabah Mabrouk, ex-enseignante, et Kaoutar Bouzari, Ingénieur d’État en génie industriel, nous avons décidé de créer une association axée sur l’éducation et l’inspiration des jeunes Marocains. Nous y organisons des compétitions scientifiques, workshops et camps d’été pour atteindre ces objectifs.
Notre but est de démocratiser l’accès à l’astronomie et l’exploration spatiale, et de préparer les jeunes à poursuivre des carrières dans l’aéronautique et l’aérospatiale pour devenir ingénieurs, chercheurs, médecins, architectes, techniciens ou astronautes d’un potentiel futur programme spatial marocain. »
Parlez-nous de l’Association Marocaine des Études Spatiales (A.M.E.S) dont vous êtes le président. D’où est venue l’idée de créer cette association et quelles en sont les actions stratégiques ?
« Depuis sa création en 2022, l’A.M.E.S a lancé plusieurs programmes, dont deux majeurs : le Programme Astrokids et le Programme Space. Ark. Le Programme Astrokids, destiné aux élèves de CM2 et de la 6e année du primaire, a été conçu comme une compétition scientifique (Space Science Fair). La première édition a rassemblé 64 élèves d’écoles publiques du quartier de Bensergao. Répartis en équipes de trois, les participants ont travaillé pendant deux mois avec leurs enseignants pour préparer un stand présentant une planète de notre système solaire. La compétition était intense et le jury a eu du mal à départager ces aspirants astronautes.
Le Programme Space.Ark, un workshop de 10 jours pour les étudiants en architecture, a été une plateforme d’échange entre jeunes architectes et scientifiques internationaux du domaine spatial. Cette première édition, organisée à Agadir à la Cité de l’Innovation Souss Massa, a permis aux participants de concevoir un habitat pour trois astronautes, que ce soit en orbite terrestre, sur la Lune ou sur Mars. Ces initiatives ont suscité un grand enthousiasme parmi les jeunes et ont renforcé l’intérêt pour les carrières dans l’aéronautique et l’aérospatial. »
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre première mission en tant qu’astronaute analogique ?
« Participer à une mission spatiale analogique consiste à simuler une mission habitée dans un environnement terrestre similaire à celui de la Lune ou de Mars. J’ai eu l’honneur d’être le premier astronaute analogique marocain à participer à une mission de l’Interplanetary Space Agency en 2024. Nous avons vécu en immersion totale dans les galeries souterraines des montagnes de Cantabria en Espagne, simulant une potentielle mission habitée sur Mars à la recherche de traces d’eau et de vie.
En tant que concepteur d’habitats spatiaux, ma mission spécifique fut d’étudier l’habitat souterrain qui nous a servi de refuge pendant une semaine et de proposer des pistes d’amélioration de ce dernier. D’une certaine façon, on peut dire que je suis allé sur Mars, ou presque ! »
Des enfants d’Agadir futurs astronautes ? Rêve ou réalité ?
« En tant qu’architecte et passionné d’exploration spatiale, je crois fermement que ce rêve peut devenir une réalité. Agadir a une connexion unique avec l’histoire de l’astronautique grâce à la visite de Neil Armstrong en 1984. Cette visite historique de l’un des pionniers de l’exploration lunaire à l’Université Ibn Zohr devrait être une source d’inspiration pour les générations futures. L’histoire de Neil Armstrong marchant sur la Lune, et plus tard visitant notre ville, symbolise un pont entre nos aspirations et les étoiles.
Le programme international lunaire Artemis, qui vise à établir une base permanente sur la Lune, est une initiative moderne qui ouvre de nouvelles possibilités. Si la communauté d’Agadir, avec ses jeunes curieux et motivés, se rallie autour de cette vision d’exploration spatiale, je suis convaincu que nous verrons des enfants de notre ville parmi les équipages d’astronautes en route vers la Lune. Avec le soutien adéquat et une éducation orientée vers les sciences et l’astronautique, ce rêve est non seulement possible mais aussi à portée de main. Le futur appartient à ceux qui osent rêver grand et travailler dur pour transformer ces rêves en réalité. »
En 1984, l’Astronaute Neil Armstrong posait le pied à Agadir
Quinze ans après avoir foulé le sol de La Lune, le 21 juillet 1969, en prononçant cette phrase mythique « C’est un petit pas pour l’homme, mais un bond de géant pour l’humanité », Neil Armstrong posait le pied à Agadir ! L’Astronaute américain était en effet présent à l’inauguration officielle de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines d’Agadir en 1984, et y a même donné une conférence. Il apparaît sur une photo d’époque à l’Amphi 4 de la faculté avec, à sa gauche, le Pakistanais Mohamed Abdoussalam, prix Nobel de physique 1979. Une belle anecdote pour les aspirants astronautes de notre ville.