LE PROJET DE MUSÉE DE LA RECONSTRUCTION D’AGADIR

LE PROJET DE MUSÉE DE LA RECONSTRUCTION D’AGADIR

Avant que la pandémie de Covid-19 ne vienne imposer la fermeture des musées, la ville d’Agadir célébrait, au mois de février 2020, le 60e anniversaire de sa reconstruction. Succédant à la tragédie du séisme, la Reconstruction fut en effet une période fervente qui fait aujourd’hui partie de l’histoire. Ce regard, à présent porté avec plus de recul, appelle à la création d’un musée retraçant la renaissance de la ville et rendant hommage aux grands hommes qui y ont participé. Pour sa réalisation, ce projet a bénéficié de l’impulsion donnée aux projets muséaux grâce au coup d’envoi du Programme de Développement Urbain de la Ville d’Agadir 2020-2024, donné le 4 février 2020 par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, et dont le Volet 5 consacre 663 millions de DH à la promotion des lieux culturels, cultuels et patrimoniaux.

 

UN PROJET HAUTEMENT SYMBOLIQUE

Jouer un rôle de conservation et de mise en patrimoine, c’est la volonté exprimée dans le projet de création du Musée de la Reconstruction, tant pour honorer ce souvenir que pour transmettre cet héritage patrimonial à la postérité. Plus de 60 ans et plusieurs générations après le séisme et le début de la reconstruction architecturale, le temps est en effet venu de présenter les archives de cette époque au sein d’un espace muséal dédié à révéler ce pan d’histoire mémorable au grand public.
Le projet ne disposant pas de collections actuellement, il est attendu que cet espace de valorisation soit un catalyseur du dépôt de fonds d’archives de la part des institutions et des collectionneurs privés.
Dans le cadre de sa réalisation, le projet de Musée de la Reconstruction se place sous la maîtrise d’ouvrage de la Wilaya d’Agadir, la maîtrise d’ouvrage déléguée d’Al Omrane Souss Massa et la maîtrise d’œuvre de l’Architecte Rachid Andaloussi, Bouillon de Culture pour l’ingénierie culturelle et Studio Adeline Rispal pour la scénographie.

Le musée trouvera place au sein d’un des rares bâtiments ayant survécu au séisme, l’ancien siège de Bank Al-Maghrib

 

L’ANCIEN BÂTIMENT DE BANK AL-MAGHRIB

Pour concrétiser l’idée de Musée de la Reconstruction, il fallut trouver un écrin à la hauteur de la thématique. Après réflexion, le choix du lieu se porta sur un bâtiment historique et emblématique : l’ancien siège de Bank Al-Maghrib, seul bâtiment demeuré quasiment intact dans ce quartier grâce à des fondations s’apparentant aux structures parasismiques. Occupant un îlot d’angle sur trois faces, l’édifice date de 1950. Il est la création de François Louis Lemarié (1902-1996), architecte d.p.l.g,. expert auprès des tribunaux, né à Paris et issu des Arts et Métiers et des Beaux-Arts.
Plutôt austère, la façade du bâtiment se nuance d’un dessin en créneaux et une partie du premier étage repose sur des colonnes massives en pierre de taille. Après avoir abrité les services de la banque centrale du Maroc dans le passé, l’édifice sera réhabilité selon sa typologie initiale, tout en lui donnant une nouvelle vocation muséale.

 

UNE RÉHABILITATION ARCHITECTURALE

Dans la mise en œuvre du projet de Musée de la Reconstruction, l’ancien bâtiment de Bank Al-Maghrib fera partie intégrante du parcours scénographique. La structure intérieure du bâtiment, son dessin, comme ses décors et ses parures, seront rétablis, tandis qu’en parallèle, une salle polyvalente sera créée pour les divers événements organisés par le musée et l’accès à la terrasse sera aménagé en café littéraire. Par ailleurs, l’immeuble sera doté d’équipements techniques aux normes actuelles au niveau de la ventilation, de la climatisation et du désenfumage.
Dans ce projet, la qualité de la lumière est déterminante, d’où le choix de préserver une arrivée de lumière naturelle qui guidera le visiteur jusqu’au cœur du musée. Le parti pris repose ainsi sur la réinterprétation de la verrière existante. Tout en gardant le principe d’utilisation du pavé de verre, une nouvelle lecture sera apportée, en lien avec le concept scénographique du musée. Sculptés en quatre faces de diamant, ces pavés de verre permettront à la lumière de se déplacer par touches et de manière aléatoire à travers le hall central.

LE CONCEPT SCÉNOGRAPHIQUE

Comprendre le passé pour mieux construire l’avenir, c’est le concept de la scénographie qui prendra place au sein du Musée de la Reconstruction d’Agadir et qui sera placée sous le thème de « La mémoire du futur ». Ce musée de la résilience par excellence permettra ainsi de nourrir les mémoires des citoyens, tout en dynamisant leur projection dans le futur grâce à la recherche historique menée, à l’exposition et aux activités culturelles proposées. Le parcours de visite comportera plusieurs sections consacrées au choc du séisme, à la reconstruction et à l’urbanisme et l’architecture.

SECTION I : LE CHOC

Au point zéro, il y eut la fracture avec le temps d’avant… Douze secondes qui changèrent à jamais tout ce qui fut dans la cité avant 1960. Pour en comprendre l’intensité, le Musée de la Reconstruction proposera une Séquence 1, au rez-de-chaussée, où le visiteur connaîtra une immersion sensorielle. Pour ressentir la puissance destructrice du tremblement, une vidéo sera projetée sur trois parois constituées de rideaux acoustiques, tandis qu’un faux plancher en pente légère reproduira des vibrations. Les enfants auront la possibilité de contourner cette étape sensible.
La Séquence 2 aura pour finalité d’apporter des explications historiques et scientifiques du tremblement de terre d’Agadir. Dans la salle, une frise déroulera les huit mois qui suivirent le séisme, détaillant les grands moments de gestion du chaos et des opérations d’urgence.
Au fond de la salle, la Séquence 3 exposera des données scientifiques relatives au séisme, derrière la cimaise consacrée au discours du Roi, garant des institutions scientifiques et de la reconstruction à venir.
La Séquence 4 se poursuivra enfin dans l’angle de l’atrium central. Elle s’intéressera aux effets physiques du séisme et permettra une transition avec l’installation de la Section II, dédiée à la reconstruction.

SECTION II : LA RECONSTRUCTION

Les visiteurs poursuivront leur parcours par la Section II qui se déploiera dans l’espace central, sous la voûte de pavés de verre. Un ascenseur panoramique permettra d’accéder à l’étage, offrant une autre vision sur cette partie.
Le concept scénographique de la Section II sera de montrer comment l’action des hommes fit émerger l’ordre du désordre, après le cataclysme naturel qui leur fut infligé. Pour l’évoquer, le sol du grand espace sera jonché de plaques empilées de manière chaotique d’où s’élèveront des surfaces plus abstraites. Certaines plaques seront des écrans LCD, d’autres des reproductions de photos, des textes ou des objets. Des images en noir et blanc se mêleront aux quadrillages noirs et blancs du sol et des murs du rez-de-chaussée, créant ainsi une atmosphère dramatique.
Tout autour de cette métaphore du chaos, un affichage mural déroulera la séquence faisant transition avec l’étage : celle de l’introduction à la reconstruction architecturale, expliquant comment l’État a mis en œuvre les conditions matérielles, économiques et humaines nécessaires aux futurs projets d’urbanisme et d’architecture.

SECTION III : ARCHITECTURE ET URBANISME

Dans un premier temps, la Section III de la scénographie du musée mettra en avant l’énergie collective, l’esprit d’innovation et l’engouement créatif pour la reconstruction architecturale, dont les grands concepteurs et bâtisseurs y seront présentés. Au centre de la première salle, une table de médiation, ainsi qu’un atelier pour enfants, offriront une expérience personnelle supplémentaire aux visiteurs de tous âges.
Face à une grande frise le long du corridor, un film panoramique d’Agadir sera diffusé sur grand écran. La dernière salle permettra aux visiteurs de s’intéresser à douze projets phares de la reconstruction urbaine et architecturale, grâce à une borne interactive intégrant la maquette 3D. Deux de ces projets seront situés plus bas pour être accessibles aux enfants.
Sur le mur, des panneaux zoomeront sur les trois projets les plus emblématiques de cette époque, proposant des interviews ou des vidéos documentaires présentant les architectes, en plus d’un ensemble de plans, photographies et dessins.

LES POINTS FORTS DU SITE

Situé au centre-ville, le site d’implantation du Musée de la Reconstruction est au carrefour de la vie économique, sociale et culturelle d’Agadir, dans un espace tampon favorisant la notoriété de l’établissement entre la zone touristique et balnéaire et les quartiers résidentiels. D’ores et déjà, cette zone de convergence entre les espaces touristiques et résidentiels constitue un univers de circulation, de rencontre et d’échange très prisé. En outre, le bâtiment bénéficie d’une bonne ouverture sur les boulevards Général Kettani et Hassan II, tout en tirant profit de plusieurs artères et connexions du centre-ville et du passage du Bus à Haut Niveau de Service qui traversera le centre administratif d’Agadir. De par sa localisation, et au-delà de sa vocation culturelle, le projet bénéficiera des atouts d’une future requalification urbaine afin de favoriser son intégration avec son environnement immédiat. Il deviendra un repère urbain majeur et attractif.

Sources :
Diagnostic Bouillon de Culture
Scénographie Studio Adeline Rispal
Agence Rachid Andaloussi Benbrahim Architecte
Al Omrane Souss Massa